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Vous en avez forcément déjà entendu parler… Bien que fréquemment critiquée, la pédagogie Montessori est devenue incontournable. Il faut dire qu’elle a des alliés de poids pour en faire la promotion : les dirigeants des GAFAM sont nombreux à inscrire leurs enfants dans des écoles Montessori aux États-Unis. Certains ont eux-mêmes été élèves dans ces classes. Cette pédagogie est fondée sur l’expérience individuelle, visuelle et kinesthésique. Elle utilise un matériel pédagogique qui favorise l’expérimentation. Grâce à ces outils, l’élève reçoit en effet un retour immédiat afin d’apprendre par tâtonnement en se corrigeant lui-même. La pédagogie Montessori s’inscrit donc dans le mouvement de l’Éducation nouvelle, comme les techniques de Célestin Freinet ou bien encore la pédagogie institutionnelle. Elle tire sa légitimité scientifique du statut de médecin de sa fondatrice, le docteur Maria Montessori. Ces méthodes feraient des miracles auprès des enfants souffrant de pathologies qui impactent l’apprentissage. Par ailleurs, elles développeraient l’autonomie et la créativité des élèves.

1. Avantage des symboles grammaticaux Montessori

Pour initier les élèves à la grammaire, la pédagogie Montessori représente les différentes classes grammaticales avec des symboles. Les élèves doivent les associer à des mots et les placer dans l’ordre sous une phrase qu’ils analysent.

Cette approche permet de substituer des formes géométriques au métalangage grammatical et abstrait. On utilise donc une représentation visuelle, concrète et attrayante. Elle permet aux élèves d’appréhender la grammaire par la manipulation physique plutôt que par l’écrit.

Les symboles utilisés portent une logique. Ainsi, tous les éléments du groupe nominal sont des triangles. Le grand triangle noir, qui désigne une chose, est un nom. Sa taille en fait l’élément principal du groupe. Il est toujours accompagné d’un petit triangle bleu : le déterminant. Par ailleurs, il arrive qu’un triangle bleu de taille moyenne soit présent… Il s’agit de l’adjectif qualificatif ! Parfois, le nom est remplacé par un petit mot qui le désigne : le pronom est donc représenté sous la forme d’un triangle fin.

Par ailleurs, le verbe, qui désigne l’action, est un grand cercle rouge. Son sens peut être nuancé ou précisé par des mots qu’on appelle les adverbes. Comme ils sont liés au verbe, ils sont représentés par la même forme : un petit cercle orange.

Il est intéressant d’utiliser cette méthode pour développer des automatismes chez les élèves. Par exemple, le déterminant accompagne toujours un nom. Le petit triangle bleu ne peut donc être utilisé que si un grand triangle noir se trouve à proximité. Si ce n’est pas le cas, alors ce mot ne peut pas être un déterminant… Peut-être s’agit-il plutôt d’un pronom ou d’une préposition ?

2. Symboles Montessori : pour tous les élèves ?

Tout d’abord, cette méthode présente peu d’intérêt pour les élèves qui maîtrisent déjà le métalangage. Ceux-là n’en ont pas besoin et l’utilisation des symboles alourdit leur tâche. En effet, ils identifient d’abord la classe grammaticale puis cherchent à se souvenir du symbole utilisé pour celle-ci.

collégien et bande de grammaire Montessori

L’analyse grammaticale au collège avec les symboles Montessori.

On observe la même imperméabilité dans le sens inverse. Les symboles peuvent être utiles pour des élèves qui sont totalement perdus en grammaire. Ainsi, certains élèves de 3ème m’ont dit que grâce à ces symboles ils comprenaient enfin que chaque mot avait un rôle différent dans la phrase. Ils se sont réconciliés avec la grammaire et prenaient plaisir à analyser des phrases, les unes après les autres, en réclamant même toujours plus. Toutefois, dès qu’on réintroduisait le métalangage, ils décrochaient à nouveau.

Cette méthode est donc efficace comme vecteur de motivation. C’est une excellente porte d’entrée dans l’activité grammaticale pour les élèves décrocheurs.

Néanmoins l’outil montre ses limites lorsqu’on dépasse le stade de l’initiation, ce qui est le cas au collège. Ainsi, il ne permet pas d’introduire des typologies précises. Rien ne distingue par exemple le déterminant article indéfini du déterminant article possessif ou démonstratif. De même, le nom propre n’est pas différencié du nom commun. Les verbes d’action se confondent avec les verbes d’état… Par ailleurs, il ne permet pas d’aborder les natures grammaticales à l’échelle de la phrase en identifiant les différents types de propositions.

3. Feedback immédiat : mettre en place des ateliers de travail autonome

L’avantage du matériel Montessori réside dans le fait qu’il permet de mettre en place des ateliers de travail autonome. En effet, ces outils sont auto-correctifs car ils sont conçus avec l’exigence d’apporter aux élèves un retour immédiat sur leurs actions.

On peut donc utiliser ce matériel pour permettre aux élèves de préparer des ceintures de compétences.

Ainsi, on peut réserver une heure hebdomadaire au travail en autonomie. En s’appuyant sur le passeport de compétences, on peut mettre à disposition des élèves des fichiers auto-correctifs. Les cartes à pinces sont particulièrement appréciées et peuvent aisément se décliner dans les différents domaines de l’étude de la langue : fonctions et classes grammaticales, homophones, figures de style…

Pour l’analyse grammaticale, on peut proposer aux élèves des bandes sur lesquelles on a écrit des phrases à analyser. Ils placent ensuite les symboles sous la bande, puis ils la retournent pour vérifier leur réponse. Pour bâtir une progression pédagogique, on peut regrouper les bandes en différents paquets. A chaque fois qu’on ajoute une nouvelle classe grammaticale, on crée un nouveau paquet.

Enfin, acheter des symboles pour tous les élèves coûte cher si vous passez par des boutiques spécialisées… Vous pouvez donc photocopier des symboles que les élèves rangeront dans une pochette. Mais vous perdez alors un peu de la dimension kinesthésique du dispositif pédagogique. Pour ma part, j’ai donc demandé au professeur de technologie de m’aider. Ainsi ce sont mes élèves qui ont fabriqué les symboles que nous utilisons en classe ! J’ai rédigé un cahier des charges qu’ils ont étudié puis ils ont réalisé les différentes pièces en utilisant les machines présentes au collège.

4. Expliquer les symboles Montessori aux élèves

Pour introduire les symboles Montessori dans son cours, on peut utiliser différentes méthodes.

Si vous pratiquez le rituel de la phrase du jour, vous pouvez introduire les symboles au fur et à mesure de votre progression. Petite astuce : imprimez des symboles sur un papier aimanté pour imprimante. Vous pourrez ensuite les utiliser sur le tableau de votre salle. Ainsi, vous pratiquerez la différenciation pédagogique : vous conserverez l’utilisation du métalangage mais permettrez aux décrocheurs de s’appuyer sur les symboles Montessori.

Vous pouvez aussi distribuer un guide aux élèves. Pour chaque symbole, vous associez une question qui leur permettra d’identifier la classe grammaticale du mot.

Enfin, vous pouvez créer des cartes sur lesquelles figureront des mots et le symbole correspondant au verso. Donnez aux élèves des boîtes qui portent les différents symboles. Les élèves doivent ranger les cartes dans la bonne boîte. Lorsqu’ils ont terminé, ils peuvent vérifier leurs réponses en retournant les cartes de chaque boîte. Cette technique repose sur un apprentissage par analogie.

Mathieu

Après avoir été professeur de lettres classiques pendant 11 ans, je suis devenu auteur de livres numériques en auto-édition. Par ailleurs, je publie sur ce blog des articles en lien avec l’histoire littéraire et la didactique des lettres.