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« J’ai raté mon cours », « ils ont été horribles aujourd’hui », « je n’ai pas réussi à faire ce que j’avais prévu », « ils n’ont pas du tout accroché ». Quel enseignant n’a jamais fait cet amer constat à la fin d’un cours ? Inutile donc de se flageller et de penser être le pire professeur de tous les temps. Comme pour nos élèves, l’échec peut être source d’apprentissage si nous prenons le temps d’analyser notre pratique. Quelles erreurs a-t-on commises pendant cette séance ? Un bon cours réunit de nombreux facteurs qu’il faut savoir équilibrer pour améliorer sa gestion de la classe.

1. L’enseignant : de l’homme-orchestre au chef d’orchestre

La journée d’un enseignant ne se résume pas à faire cours : photocopies, préparation de cours, correction d’évaluations, réunions de concertation, organisation de sorties scolaires, rencontres avec les parents, rédaction de bilans et de rapports… Les sollicitations sont nombreuses et les micro-tâches se multiplient. Tout cela vient encombrer notre esprit et nous donne l’impression de toujours courir après le temps.

De plus, l’arrivée de l’ordinateur et des ENT dans nos classes nous a rendus joignables à tout moment. On peut maintenant recevoir des messages de la vie scolaire, de l’administration voire des parents alors que nous sommes en train de faire cours. Cela nous distrait d’autant plus que les émetteurs ont tendance à considérer qu’un message envoyé est lu instantanément. Dorénavant, l’information se diffuse dans l’urgence et les délais octroyés aux réponses se raccourcissent.

Pourtant, dans une classe, l’impulsion est donnée par le professeur. Il doit donc être totalement présent et entièrement à sa tâche d’enseignement. Impossible d’avoir la tête ailleurs.

L’enseignant ne doit pas se disperser car il est le chef d’orchestre de la classe. Il encadre le travail, coordonne les activités et donne le tempo. Sans lui, la classe déraille. On requiert sa vigilance à tout instant. Si une brèche s’ouvre, les élèves les moins attentifs s’y engouffreront et en profiteront pour eux aussi divaguer et s’amuser.

La classe doit vous sentir présent. Vous devez occuper l’espace en vous déplaçant et capter le regard de votre auditoire.

Par ailleurs, si vous êtes distrait par d’autres préoccupations professionnelles ou personnelles, vos explications risquent de devenir moins claires, plus embrouillées. Les élèves auront donc plus de difficultés à suivre le cours.

2. Anticiper : préparer son scénario pédagogique

Prof perdu

Le prof doit savoir où il va s’il veut accompagner efficacement ses élèves.

Improviser nous met en difficulté. Plus le cours est balisé et plus notre attention est disponible pour l’encadrement de la classe.

Pendant une heure de cours, l’enseignant aura à gérer de nombreux imprévus : une défaillance technique du matériel informatique, un conflit entre deux élèves, une interruption du cours pour délivrer une information de vie scolaire, des oublis de matériel, des travaux non faits, des élèves particulièrement dissipés ce jour-là…

Pour ne pas se sentir débordé et risquer de perdre le contrôle, le professeur doit avoir soigneusement préparé sa séance pédagogique. Il doit définir au préalable ses objectifs et savoir clairement où il veut mener la classe.

3. Être à l’écoute de la classe

Mais il ne s’agit pas pour autant d’avoir le nez collé à son scénario pédagogique, ni de s’obstiner à le suivre lorsqu’on sent que cela coince.

Savoir s’adapter et faire preuve de souplesse

Si vous voulez engager vos élèves dans le travail, il faut partir de leurs idées et peu à peu revenir à ce que vous aviez prévu. Ainsi, il sera parfois opportun de transformer une activité écrite en un débat littéraire oral. De même, peut-être devrez-vous rebondir sur une remarque d’un élève et changer l’ordre initial de vos activités. Quitte à faire des détours, l’essentiel est de construire le savoir et de mener vos élèves là où vous l’aviez décidé.

S’assurer que les élèves sont disposés à recevoir votre enseignement

Enseigner, c’est dialoguer avec les élèves et s’adapter à leur feedback. Si vous sentez qu’ils ne sont pas dans des dispositions adéquates, ne forcez pas. Laissez quelques instants de côté ce que vous aviez prévu et réglez le problème.

Par exemple, un jour, j’ai senti une atmosphère lourde en classe. Il n’y avait pas un bruit mais les élèves n’étaient pas avec moi. Ils arboraient des mines soucieuses pour les uns, renfrognées pour les autres. J’ai laissé là la dictée et j’ai mis les pieds dans le plat.

Elèves en classe

Vos élèves sont-ils disposés à recevoir votre enseignement ?

Il y avait en fait un conflit entre eux qui les avait occupés la majeure partie de la journée, une histoire de changement d’emploi du temps qui avait été fait dans le dos des uns par les autres. Aucun enseignant n’avait pris le temps de les écouter, pas même leur professeur principal. Ce qui semblait un détail pour nous adultes n’en était pas un à leurs yeux. Ils se disputaient depuis le début de la journée à ce sujet.

Ils avaient besoin de crever l’abcès en présence d’un médiateur qui les aiderait à s’écouter les uns les autres et à tirer une conclusion de cette mauvaise expérience de vie collective. Nous avons ensuite pu nous remettre au travail dans un climat apaisé et serein. Les élèves, libérés de leurs contrariétés étouffées, ont pu se consacrer au cours.

4. Varier les activités

Si les méthodes d’enseignement ont évolué, laissant une plus large part aux pédagogies actives et inductives, nos élèves ont tout de même l’impression légitime de passer leurs journées assis à écouter des professeurs qui défilent et déballent leurs cours.

Il est donc important de relancer régulièrement leur attention en variant les activités.

Alternez donc les tâches orales et écrites d’une part, les activités individuelles, en binôme ou en groupe d’autre part. Ces deux paramètres vous offriront déjà une large palette de configurations.

Mais vous pouvez aussi varier les supports de travail : sur une feuille, au tableau, sur un ordinateur.

Diversifiez également les traces écrites : prise de notes, rédaction de paragraphes élaborés, conception de cartes heuristiques.

Prévoyez enfin des respirations : tracer un tableau, colorier, découper…

Il peut parfois être utile d’arrêter le cours. Un jour, alors que nous étudiions les propositions subordonnées, j’ai senti mes élèves très fatigués et peu investis. Pourtant, ce cours est particulièrement difficile et requiert leur engagement. J’ai donc fait une pause dans le cours. Je leur ai lu quelques aventures amusantes des malheurs de Sophie. J’ai ainsi remobilisé leur attention et nous avons pu poursuivre notre cours de grammaire.

5. Gérer le rythme : contrôler la durée des activités

Durée de l'activité

Les élèves sont plus efficaces quand ils connaissent la durée de l’activité.

C’est sans doute le plus difficile dans la gestion d’un cours : le rythme de la séance. Le temps scolaire est limité et les sonneries s’enchaînent au fil de la journée. Impossible d’empiéter, ne serait-ce qu’une minute, sur le cours suivant sans risquer de vous attirer les foudres de votre collègue, lui aussi stressé par ce temps qui lui file entre les doigts.

Votre scénario pédagogique doit donc prévoir la durée de chaque activité.

Moins de temps pour plus d’efficacité

Certains élèves sont plus lents que d’autres. Pour certains, la mise au travail est longue. Plus vous leur laissez de temps, et plus ils en prendront. Or, si le rythme que vous impulsez est trop lent, vos élèves s’ennuieront et se perdront dans leurs pensées. Vous sentirez une grande mollesse s’emparer de la classe. Il vous faudra sortir les rames et lutter contre une inertie collective désarmante.

Pour éviter cet écueil, au début de chaque activité, annoncez aux élèves le temps dont ils disposent pour accomplir leur tâche. Vous pourrez ensuite librement moduler cette durée si vous sentez que la classe en a besoin. Avoir une échéance stimule les élèves et les rend plus efficaces.

Une tâche à la fois

A contrario, ne pressez pas vos élèves en multipliant les tâches simultanées. Veillez à donner une seule tâche à la fois. Ainsi, on est souvent tenté de poser une question ou de lancer une activité tandis que certains élèves sont encore en train de coller leur feuille ou de recopier le tableau. Ils n’arrivent alors plus à suivre et décrochent. De même, on donne parfois les consignes pour le travail à la maison alors que certains n’ont pas terminé de noter le bilan de la séance. Pour éviter ces précipitations en fin d’heure, faites noter les devoirs dans l’agenda en début d’heure quand c’est possible.

Lors de votre préparation du scénario pédagogique, ne soyez pas trop ambitieux et ne prévoyez pas plus de trois activités par séance, dont une courte. S’il le faut, soyez prêt à sacrifier une activité. En pédagogie, rien ne sert de courir…

Mathieu

Après avoir été professeur de lettres classiques pendant 11 ans, je suis devenu auteur de livres numériques en auto-édition. Par ailleurs, je publie sur ce blog des articles en lien avec l’histoire littéraire et la didactique des lettres.