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Comment aider les élèves dyslexiques en français ? Si vous enseignez le français, vous avez certainement déjà été confronté à la question de l’accueil des élèves dyslexiques dans votre cours. On estime qu’entre 5 et 10% de la population souffre de dyslexie. On peut donc parier que vous avez au moins un élève concerné dans chacune de vos classes, voire plusieurs… Par conséquent, il est essentiel que vous vous demandiez comment aménager un cours de français pour les élèves dyslexiques.

La dyslexie est un trouble durable de l’apprentissage de la lecture qui entraîne une dysorthographie. C’est notamment le cas pour les locuteurs de langues non transparentes, comme le français ou l’anglais par exemple. Une des difficultés à laquelle sont confrontés les élèves dyslexiques est l’association de plusieurs phonèmes à un même graphème. Cela relève de l’exception en français (ex: femme) alors que c’est fréquent en anglais et inexistant dans les langues transparentes. En revanche, les dyslexiques français doivent faire face à l’association de plusieurs graphèmes à un même phonème, d’où la dysorthographie. On comprend ainsi mieux pourquoi les difficultés en orthographe des dyslexiques italiens et espagnols sont moins prononcées.

Ce trouble ne traduit pas une déficience intellectuelle. Il s’agit uniquement d’un usage du cerveau qui diverge de la norme dominante. Les neurosciences s’y intéressent beaucoup et tentent actuellement de mieux comprendre son origine.

1. Orientez vers un bilan orthophonique suite au test R.O.C

On considère qu’un enfant est dyslexique lorsqu’il accuse un retard d’au moins deux ans dans l’apprentissage de la lecture pour des raisons neurobiologiques. Nous, enseignants, ne pouvons donc pas diagnostiquer la dyslexie. Un bilan orthophonique sera dans tous les cas nécessaire. Néanmoins, il nous est possible d’alerter les parents lorsqu’on suspecte la présence d’un tel trouble chez un élève.

Je vous conseille de ne pas entreprendre seul cette démarche. Demandez l’avis de vos collègues et prenez conseil auprès de votre direction avant d’appeler les responsables légaux de l’élève.

La dyslexie touche d’abord la lecture. Des difficultés en orthographe, notamment en ce qui concerne les accords et la conjugaison, ne suffisent donc pas à suspecter une dyslexie.

Voici quelques signes qui seront en revanche plus pertinents :

  • difficulté à lire de manière fluide
  • grande lenteur dans la lecture et l’écriture
  • difficulté à découper convenablement les mots d’une phrase
  • non compréhension d’un texte que l’élève a lu lui-même
  • erreurs d’orthographe phonétiquement aberrantes
  • nombreuses erreurs en copiant le tableau
  • omissions de certaines syllabes ou lettres à l’écrit
  • erreurs dans le découpage des mots à l’écrit
  • une grande fatigabilité lors des tâches de lecture et d’écriture.

Pour faciliter votre travail de repérage des élèves qui ont un trouble de l’apprentissage de la lecture, et donc potentiellement une dyslexie, des médecins et des chercheurs en sciences de l’éducation ont élaboré un outil. Il s’agit du test R.O.C. (Repérage Orthographique Collectif). En deux séances, vous pourrez tester l’ensemble de vos élèves de manière discrète et non stigmatisante à travers de rapides exercices dont la correction ne vous prendra que peu de temps.

2. Mettez en place des dictées aménagées

Si la dyslexie d’un élève est avérée par un bilan orthophonique, l’élève bénéficiera d’une dictée aménagée lors du D.N.B. Vous pouvez donc réaliser, vous aussi, cet aménagement en classe.

Il vous suffit de taper le texte que vous allez dicter aux autres élèves. Veillez à utiliser une police de grande taille et à aérer le texte avec au moins un double interligne.

Ajoutez des propositions multiples pour une dizaine de mots. Privilégiez la réflexion grammaticale. L’élève devra choisir la bonne orthographe et recopier la bonne réponse sans erreur.

3. N’évaluez pas l’orthographe en expression écrite

Un élève dyslexique peut surmonter sa dysorthographie au prix de coûteux efforts ou en développant des stratégies de compensation qui se révèlent épuisantes.

Lors des évaluations d’expression écrite, il semble donc judicieux de ne pas évaluer l’orthographe. Cela vous évitera d’ailleurs de perdre beaucoup de temps à souligner la quasi totalité de la copie lors de votre travail de correction. De plus, prenez en compte qu’il est très décourageant pour un élève, déjà en souffrance et fâché avec l’écrit, de recevoir une copie pleine de rouge…

Si l’élève en est capable, vous pouvez cependant choisir de n’évaluer l’orthographe que dans les premières lignes de sa copie, qu’il aura rédigées en étant moins fatigué.

De même, si vous ne notez pas l’orthographe, vous pouvez souligner les erreurs grammaticales dans les premiers paragraphes. Ainsi, lorsque les autres corrigeront leurs erreurs en classe, l’élève dyslexique aura aussi du travail et ne se sentira pas stigmatisé.

4. Oralisez la lecture

Généralement, les élèves dyslexiques n’aiment pas lire… Cette activité leur demande tellement d’efforts qu’on peut aisément l’entendre. Pour eux, le déchiffrage des mots est si laborieux et énergivore qu’ils n’arrivent pas à se concentrer simultanément sur la compréhension du texte.

Ils n’aiment pas lire mais, comme les autres, ils aiment les histoires ! Comme les autres, ils sont tout à fait capables de comprendre une intrigue et d’interpréter un texte à partir du moment où vous leur facilitez la tâche.

Pour cela, pensez à oraliser la première lecture d’un texte. Ne la déléguez pas aux élèves. Vous devez vous en charger afin que ceux qui sont le plus en difficulté puissent découvrir l’histoire de manière compréhensible et audible. Très souvent, la lecture orale des élèves est trop lente, trop rapide, trop hachée… Il sera donc préférable de les faire lire à la fin de votre séance de lecture analytique.

Vous pouvez aussi utiliser des lectures enregistrées. Vous trouverez certainement votre bonheur sur le site Littérature audio. Utilisez aussi des illustrations et, pourquoi pas, des vidéos !

5. Utilisez des cartes heuristiques

Non seulement les élèves dyslexiques ont du mal à copier leur cours, mais il leur est aussi très compliqué de le relire et de le comprendre.

Vous pouvez leur faciliter la tâche en utilisant des cartes heuristiques en guise de bilans.

Pour les autres élèves, la création d’une mindmap est en plus une excellente activité pour faire le point sur leurs connaissances et sur ce qu’ils ont appris dans votre cours.

Pensez-y lorsque vous préparez votre séquence pédagogique.

6. Adaptez des documents avec Dys-vocal

Dys-vocal est un logiciel disponible sous Windows. Il vous permettra de proposer des documents plus lisibles à vos élèves dyslexiques.

Il vous suffit de copier votre texte puis de paramétrer le logiciel selon vos préférences.

Son module coupe-mots fera le reste à votre place et vous n’aurez plus qu’à imprimer votre document. Le logiciel va colorer chaque syllabe du texte en alternant le rouge et le bleu. Les lettres muettes seront quant à elles grisées. Ainsi, la lecture sera facilitée.

J’ai testé plusieurs fois cet outil. Son efficacité n’est pas systématique car il faut trouver le bon paramétrage, c’est-à-dire celui qui correspond à votre élève précisément. Cependant, certains élèves dyslexiques ont apprécié cette aide.

Mathieu

Après avoir été professeur de lettres classiques pendant 11 ans, je suis devenu auteur de livres numériques en auto-édition. Par ailleurs, je publie sur ce blog des articles en lien avec l’histoire littéraire et la didactique des lettres.